Le cancer de l'ovaire est le 6e cancer le plus diagnostiqué dans le monde. Il constitue la 8e cause de décès par cancer chez la femme. A l'origine de ce terrible bilan, une détection tardive et des traitements peu efficaces face aux stades avancés. Mais deux études présentées lors du congrès 2010 font état de progrès dans ces deux domaines.
En France, on compte plus de 4 000 cancers de l'ovaire par an et près de 3 500 décès directement imputable à cette maladie1. La détection précoce est un incroyable défi : 70 à 90 % des femmes dont le cancer de l'ovaire a été détecté à un stade primaire sont toujours en vie 5 ans après le diagnostic, contre seulement 20 à 30 % de celles dont le cancer a été diagnostiqué à un stade avancé2. Malheureusement, le deuxième cas de figure est plus souvent rencontré… L'enjeu face à ce cancer est donc de pouvoir proposer un dépistage précoce et disposer de traitements plus efficaces. Deux études ont été présentées dans ce sens lors du congrès 2010 de l'ASCO.
Mieux détecter le cancer de l'ovaire chez les femmes ménopausées
"Pour les femmes à haut risque (celles qui ont des antécédents de cancer ovarien dans leur famille ou celles porteuses de mutations génétiques particulières), on conseille la chirurgie, avec ablation des ovaires et des annexes (trompes, utérus). Pour les femmes qui ne veulent pas être opérées ou les femmes jeunes à haut risque, on conseille une échographie par an au minimum", nous déclarait le Pr. Stoppa-Lyonnet, responsable du service de génétique oncologique de l'Institut Curie. Mais sachant que 80 à 90 % des femmes atteintes de cancer de l'ovaire n'ont pas d'antécédents familiaux3, il n'existe pas de tests de dépistage pour la majorité des femmes. La protéine CA125 est certes connue pour augmenter en cas de cancer de l'ovaire, mais son élévation peut aussi survenir en présence de certaines affections bénignes (kyste ovarien bénin par exemple).
Des chercheurs ont mis au point un modèle mathématique baptisé ROCA qui combine les résultats des taux de CA125 au cours du temps et l'âge de la patiente, suivi d'une échographie endovaginale et transfert vers un cancérologue si besoin4. Cet algorithme a été testé sur 3 238 femmes ménopausées âgées de 50 à 74 ans suivies pendant 8 ans. Résultat : moins de 1 % des femmes ont dû recourir à une échographie, 8 femmes ont pu être opérées suivant les résultats de ROCA. La spécificité de ROCA suivie par une échographie endovaginale est de 99,7 %, indiquant ainsi un très faible nombre de faux positifs. "Si ces résultats sont confirmés par de plus grandes études, cette technique pourrait se révéler être un outil utile et peu onéreux pour détecter le cancer de l'ovaire à un stade précoce durant lequel il est guérissable, y compris pour les types qui sont les plus agressifs" déclare le Pr. Karen Lu, principal auteur de l'étude.
Associer une thérapie ciblée pendant la chimiothérapie… et après
Les tumeurs cancéreuses de l'ovaire présentent des concentrations élevées de facteur de croissance de l'endothélium vasculaire (VEGF), protéine associée à la croissance et à la dissémination tumorales5. D'anciennes études ont montré une corrélation entre une concentration élevée de VEGF et un pronostic aggravé lors de cancer de l'ovaire. Il apparaissait ainsi naturel de tester la thérapie ciblée bevacizumab , qui cible spécifiquement le VEGF. Cette molécule agit en privant les cellules cancéreuses de nouveaux vaisseaux sanguins qui lui apportent l'oxygène nécessaire à sa croissance et sa multiplication (composé anti-angiogénique).
Présentée dans le cadre du congrès 2010 de l'ASCO, des chercheurs américains ont réparti 1 873 femmes opérées pour un cancer de l'ovaire dans trois groupes : l'un recevait un traitement par chimiothérapie classique sans , un deuxième avait chimio et bevacizumab et une troisième branche était semblable à la seconde mais avec, en plus, un traitement d'entretien par le bevacizumab seul pendant 15 mois6. Résultat : la survie sans progression médiane (période moyenne durant laquelle la maladie ne réapparaît pas) a été de 14,1 mois dans le troisième groupe contre 10,3 mois chez les femmes sous chimiothérapie seule (soit une réduction de 28 % du risque de progression du cancer). L'administration d'Avastin® associé à une chimiothérapie mais sans poursuite du traitement par Avastin® seul n'a pas offert de bénéfice à la patiente par rapport à la chimiothérapie seule.
Sachant que près de deux cancers de l'ovaire sur trois sont détectés à des stades avancés très difficiles à traiter, on peut penser que le bevacizumab va très rapidement être ajouté à la prise en charge de cette maladie.
David Bême, le 6 juillet 2010
Mis à jour le 7 juin 2011
Mis à jour le 7 juin 2011
1 - Ovaire - Fiche du rapport sur le cancer 2003 - page 119 ()
2 -Ca Cancer J Clin 1993 ;43 :7-26
3 - Gynecol Oncol.1994 ;55 :S4-S14
4 - A prospective U.S. ovarian cancer screening study using the risk of ovarian cancer algorithm (ROCA). - Asco 2010 - Abstract n°5003 ()
5 - Alper O, Bergmann-Leitner ES, Bennett TA, Hacker NF, Stromberg K, Stetler- Stevenson WG. Epidermal growth factor receptor signaling and the invasive phenotype of ovarian carcinoma cells. J Natl Cancer Inst 2001;93:1375-84. ()
6 - Phase III trial of bevacizumab (BEV) in the primary treatment of advanced epithelial ovarian cancer (EOC), primary peritoneal cancer (PPC), or fallopian tube cancer (FTC): A Gynecologic Oncology Group study. - Asco 2010 - Abstract n° LBA1 ()
2 -Ca Cancer J Clin 1993 ;43 :7-26
3 - Gynecol Oncol.1994 ;55 :S4-S14
4 - A prospective U.S. ovarian cancer screening study using the risk of ovarian cancer algorithm (ROCA). - Asco 2010 - Abstract n°5003 ()
5 - Alper O, Bergmann-Leitner ES, Bennett TA, Hacker NF, Stromberg K, Stetler- Stevenson WG. Epidermal growth factor receptor signaling and the invasive phenotype of ovarian carcinoma cells. J Natl Cancer Inst 2001;93:1375-84. ()
6 - Phase III trial of bevacizumab (BEV) in the primary treatment of advanced epithelial ovarian cancer (EOC), primary peritoneal cancer (PPC), or fallopian tube cancer (FTC): A Gynecologic Oncology Group study. - Asco 2010 - Abstract n° LBA1 ()
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